GDD.AIHPI. OPS/871019 N° D'ORDRE: 071 SERIE: 06 FEUILLET N°: 3 Sommes-nous seuls? R EXTRAIT DE PRESSE LES OVNIS ONT DISPARU Entre 1950 et 1975, ils ont sillonné sans relâche les espaces aériens du monde entier, sont entrés en contact avec des Terriens, ont parfois même enlevé certains de nos semblables les extraterrestres étaient partout, agaçant prodigieusement l'immense majorité des scientifiques et alimentant les conversations passionnées tard dans la nuit, lors des belles soirées d'été. Aujourd'hui, ils semblent avoir disparu, non seulement du ciel, mais aussi des préoccupations des Terriens. Mais que sont les extraterrestres devenus? par Pierre KOHLER OY Thinnes et David Vincent. | serve pas seulement en Europe mais businessman se confie à un journaliste Deux noms qui vous disent proba- dans le monde entier, et qui ne laisse qui expédie aussitôt une dépêche à bien les apparitions lumineuses et mys- térieuses sont effectivement, objective- ment, devenues rarissimes; ou bien elles sont aussi nombreuses que par le passé mais ne suscitent plus de témoignages par suite d'une désensibilisation du pu- blic pour la question. deux hommes n'en font qu'un puisque Roy Thinnes, acteur de son métier, est, sous le nom de David Vincent, le héros d'une série télévisée américaine que TFI a rediffusée (à une heure tardive) ces derniers mois. Cette série, Les envahis- seurs, avait déjà connu son heure de gloire dans les années soixante. Le Il suffit en tout cas de lire les édito- thème central des extraterrestres d'ap- riaux des revues spécialisées en ce do- parence humaine (qui se glissent dans le maine pour comprendre à quel point la corps des Terriens) cherchent à envahir situation est devenue dramatique pour progressivement notre planète. Le seul les groupements qui se sont donné pour moyen de les identifier est d'observer objectif de collecter, centraliser, recou- leur petit doigt, qu'ils ne peuvent replier! per, trier, archiver et disséquer à Autre caractéristique spectaculaire ima- défaut d'expliquer les observations ginée par le scénariste : ces envahisseurs d'ovnis. Naguère florissants, ils ont vu se dissolvent sur place dès qu'on leur tire en quelques années leurs membres se dessus, ne laissant en conséquence au- désintéresser du problème... et commen- cune trace. David Vincent, tout au long cer par oublier de renouveler leur cotisa- des épisodes de la série, a ainsi le plus tion! Ces éditoriaux, jadis consacrés à grand mal à vaincre le scepticisme géné- fustiger l'incompréhension des scientifi- ral. Un scepticisme qui dans l'esprit de ques, ou à obtenir une reconnaissance l'auteur symbolise celui auquel se heur-« officielle » du phénomène, sont deve- tent tous ceux qui cherchent à convain- cre de l'existence des ovnis et de leur lien avec des êtres intelligents venus d'un autre monde... En France, c'est avec les livres de Jean-Claude Bourret que les ovnis ont connu, dans les années 70, une cote sans précédent. Il est incontestable que le journaliste-présentateur vedette a fait << bouger » les choses, ne serait-ce qu'en obligeant un certain nombre de scienti- fiques à sortir de leur réserve. - nus de véritables SOS. vant ces mystérieux objets comme des « soucoupes volantes ». Le lendemain, l'expression aura fait le tour du monde... Par la suite, le terme est devenu quel- que peu désuet, et on lui préféra l'acro- nyme OVNI (Objet Volant Non Identi- fié), transformé aujourd'hui en nom commun puisqu'on l'accorde au pluriel en parlant des ovnis. Pour les Anglo- Saxons, ce sont des « UFO » (Unidenti- fied Flying Objects). Le premier groupe créé en France pour l'étude du phénomène OVNI, qui d'emblée passionne les foules, a été << Ouranos », en 1951. Puis apparaissent le GEPA (Groupement d'Étude des Phénomènes Aérospatiaux) de René Fouéré, et « Lumières dans la nuit >> de René Lagarde. Des noms connus comme ceux de Jimmy Guieu (romancier de science-fiction) ou de Aimé Michel (écrivain à succès spécialisé dans les phénomènes anormaux en général) ont marqué ces débuts. Bien vite vont fleurir Mais revenons brièvement en arrière. des dizaines d'autres groupements, 'HISTOIRE moderne des ovnis (car il y a des témoignages étranges plus ✓ anciens) a commencé ce fameux 24 juin 1947 où Kenneth Arnold, un homme d'affaires américain aux com- mandes d'un petit avion, dit avoir été escorté par neuf objets lumineux au- dessus du mont Rainier, dans les Mon- Puis l'intérêt pour les ovnis est re-tagnes Rocheuses. Nous sommes alors tombé comme un soufflé trop froid, et en pleine guerre froide et il n'est pas n'a cessé de décroître depuis. Une ten- dance d'ailleurs générale, qui ne s'ob- interdit de penser qu'il s'agit d'appareils secrets soviétiques. Au retour, le jeune moins connus, moins structurés, moins efficaces et plus éphémères. Dans leur grande majorité, les « soucoupistes >> comme les appellent ceux qui ne voient en eux que des illuminés en quête de sensationnel ou d'irrationnel sont convaincus qu'il existe une véritable conspiration du silence; que les scienti- fiques savent mais cachent la vérité au sujet de l'existence des extraterrestres venus visiter notre bonne vieille Terre. Quelques caractéristiques communes se dégagent au point que l'on peut dresser un portrait robot des engins 21 spécialisées affirment à grand renfort de titres alléchants qu'on enregistre actuel- lement une recrudescence de cas mysté- rieux. Mais on est loin des grandes vagues de 1954, de 1971, ou de 1979. Les rencontres de Lyon, par exemple, n'ont rassemblé que 60 personnes, et les deux plus grandes revues françaises spéciali- sées sont sur le point de disparaître. Ovni-présence, la revue trimestrielle de l'AESV, ne se vend qu'à 1 500 exemplai- res (à titre de comparaison, entre 50 000 et 60 000 pour Ciel et Espace) et les autres pays européens ne sont guère mieux lotis en Belgique, la SOBEPS bat désespérément le rappel de ses adhé- rents. E T les scientifiques? A l'origine, Pierre Guérin et Charles Boyer, spécialistes de la photographie pla- nétaire, étaient quasiment les seuls as- tronomes professionnels à s'intéresser au problème. Puis les chercheurs (pas seulement les astronomes d'ailleurs) ont compris que le dénigrement systémati- que n'était pas la meilleure des politi- ques, et ont commencé timidement à ne plus considérer le sujet comme tabou. Vis-à-vis du phénomène OVNI, leur attitude reste malgré tout, aujourd'hui encore, très nuancée, mais elle s'expli- que. Car le matériau de base dont on dispose, en l'occurrence, ne se compose pas d'observations au sens scientifique du terme mais de témoignages. L'étude des ovnis relève donc plus de l'enquête judiciaire, par les méthodes à utiliser, que de l'analyse scientifique. Des commissions d'experts ont ce- pendant été créées. Aux États-Unis, d'abord. On se souvient en particulier du projet « Blue Book » ou du rapport « Condon ». Mais les conclusions de ces études ont toujours été ambiguës, et le moins qu'on puisse dire est qu'elles n'ont pas fait avancer d'un pouce le problème. Mieux : les autorités améri- caines ont été si maladroites qu'elles ont été accusées de dissimulation. Depuis peu, des organismes privés se livrent ainsi, par le biais d'une loi votée à la fin des années 70 sur la liberté de l'infor- mation, à un harcèlement des agences La grande majorité des observations d'ov- nis relèvent d'une « libre interprétation » de phénomènes connus: ballons-sondes, nua- ges lenticulaires, reflets optiques dans les appareils photos, etc. Ci-contre, un reflet sur une photographie de M. Tyrlik, et un ballon-sonde photographié par Michel Ver- denet avec son télescope de 350 mm de diamètre. En dessous, un beau nuage lenti- culaire au Pic du Midi. Photo J.-L. Mi- gnard. fédérales, de la NSA (Agence Nationale pour la Sécurité) au FBI, en passant par la toute puissante CIA. Le but est d'ob- tenir que soient délivrés du secret des documents relatifs à des cas d'ovnis. Mais ceux qui ont été jusqu'à mainte- nant jetés en pâture au groupe CAUS (association de citoyens contre le secret sur les ovnis) ne sont guère significatifs, même s'ils représentent en volume plu- sieurs milliers de pages de dossiers... La France est donc, à l'heure actuelle, le seul pays à disposer d'un organisme officiel d'étude des témoignages sur les apparitions inexpliquées : c'est le GE- PAN (Groupement d'Étude des Phéno- mènes Aériens Non expliqués), qui re- lève du CNES. Créé à l'origine par Claude Poher, et dirigé aujourd'hui par Jean-Jacques Velasco, le GEPAN se réduit en fait... à son directeur! Ne rail- lons pas. Car grâce à cet organisme, beaucoup d'ovnis deviennent des ovis. (Objets Volants Identifiés), et des super- cheries montées par des mythomanes (cf. l'affaire de l'enlèvement de Frank Fon- taine à Cergy-Pontoise) ont pu être dé- masquées. Avions, ballons-sondes, ren- trées de satellites ou de météorites, conjonctions de planètes, phénomènes météo exceptionnels donnent lieu à de nombreux appels. La Gendarmerie consigne tout cela, et ses archives sont pratiquement l'unique source de docu- mentation du GEPAN... Comme elle le fut pour Jean-Claude Bourret qui en a tiré la matière de ses livres. Mais l'évolu- tion du nombre des rapports sur le sujet indique bien une tendance à l'évanouis- sement du phénomène : 900 procès ver- baux la première année de création du GEPAN, 50 seulement l'an dernier... 0 U'en est-il de l'opinion du public? La plus récente évaluation qui permette de se faire une idée est un sondage commandé en 1987 par le CISU, un organisme ufologique italien. Il en ressort que seulement 19% de nos voisins croient à l'existence des ovnis, alors qu'ils étaient 35 % en 1979. Quant à ceux qui déclarent ne pas y croire, ils sont 53 %. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. ■ 23 N° D'ORDRE: 071 SERIE: 06 EXTRAIT DE PRESSE FEUILLET N°: 4 GDD.AIHPI.OPS/871019. Sommes-nous seuls? empruntés par ces visiteurs venus d'un autre monde. Les engins décrits sont presque toujours silencieux. Lorsqu'ils se posent, ils provoquent des phénomè- nes magnétiques ou électromagnétiques (coupure de l'allumage des automobiles par exemple). D'où viennent-ils? Jimmy Guieu, depuis des années, affirme le savoir et n'hésite pas à citer les étoiles Zéta 1 et 2 de la constellation du Réti- cule, en bordure du Grand Nuage de Magellan. Mais d'autres, comme Alfred Nahon, ne cherchent pas si loin et affir- ment que des photos de la Lune, prises par des sondes spatiales et par les astro- nautes, montrent l'existence de bases extraterrestres sur notre satellite! Un cliché, étayant la thèse d'une surveil- lance exercée sur les astronautes d'Apollo par des ovnis sur la Lune, montre Aldrin près du module lunaire, avec sur le ciel noir une lueur au contour hexagonal. Or n'importe quel photogra- phe, même amateur, sait bien que cet effet s'obtient lorsque l'on photographie à contre-jour sans pare-soleil. Il s'agit simplement d'un reflet du Soleil sur le diaphragme de l'appareil, reflet renvoyé dans l'appareil par la face interne de l'objectif... U ON certain nombre de « vagues » d'apparitions ont marqué ces qua- tre dernières décennies, durant lesquelles fut collecté, dit-on, près d'un million d'observations dignes d'intérêt. On a bien enregistré, depuis deux ou trois ans, quelques cas considérés comme troublants, comme celui de Trans en Provence, et l'on a parlé par exemple de cet avion de ligne japonais escorté l'an dernier, au-dessus du Paci- fique, par une lueur non identifiée. Mais tout cela reste peu significatif. L'en- gouement pour les ovnis aurait pourtant bien pu reprendre avec le cas de Nort- sur-Erdre. Dans cette petite commune de Loire-Atlantique, au nord de Nantes, un jeune garçon de 10 ans prétendait avoir entendu et vu à 5 heures du matin, le 7 septembre dernier, un ovni dont il a enregistré le bruit. Or il n'a pas fallu longtemps pour découvrir que cet enre- gistrement est un faux : la bande, analy- sée par des experts, prouve formelle- ment que le son (vraisemblablement des parasites) a été enregistré directement du poste vers le magnétocassette incorporé, et non au micro comme le prétendait le jeune témoin. A l'intolérance des premières années, a succédé une période où bon nombre de responsables et membres de groupe- ments ufologiques se sont livrés à des réflexions intéressantes. Si bien qu'à Ci-contre, en haut : des milliers d'observa- tions d'ovnis, dans le monde entier, ont défrayé la chronique dans les années 1970; toutes les études ont mené dans un cul-de-sac les ovnis ne relèvent pas de l'observation scientifique. Photo GEOS. Photo de René Curtelin, reçue à la rédac- En bas objet réellement non identifié. tion de Ciel et Espace en février 1983. côté des traditionalistes dont le chef de file est Jimmy Guieu, est apparue une nouvelle vague, qui ne s'oriente pas ipso facto vers l'hypothèse extraterrestre mais s'intéresse avant tout au phénomène en lui-même, avec ses implications sociales et psychologiques. Perry Petrakis, l'un des animateurs de l'AESV (Association pour l'Étude des Soucoupes Volantes), Michel Monnerie, un ancien de «< Lu- mières dans la nuit », Michel Bougard de l'association belge SOBEPS (Société Belge d'Étude des Phénomènes spa- tiaux), et quelques autres, sont de ceux-là. L'AESV, fondée en 1974, a même créé avec beaucoup de sérieux les « Rencontres internationales de Lyon »>, qui depuis deux ans se tiennent au moment des vacances de Pâques. Les intervenants y exposent leurs réflexions, 40 ans d'étude des ovnis aboutissent dans une impasse parfois dignes d'intérêt. Car le but est désormais d'étudier comment les gens croient voir des ovnis, afin de trouver une explication à leur témoignage, et non l'inverse, qui consiste à faire coller aux dires des témoins une hypothèse retenue a priori. La même association a par ailleurs créé « SOS-OVNI », un numéro de téléphone qui fonctionne 24 heures sur 24 depuis février 1984. Un répondeur enregistre les témoignages et fournit les coordonnées de gens que l'on peut contacter à tout moment en cas d'urgence. C'est là, tout compte fait, une excellente initiative, complétée en juillet 1986 par l'ouverture d'un serveur Mini- tel (36.15 code LTO, traduisez : « Le Troisième Eil »). On y trouve notam- ment la liste des 1400 rencontres rap- prochées signalées en France depuis l'origine du phénomène OVNI. Enfin, des nuits de veille sont organisées plus ou moins régulièrement, avec le concours d'astronomes amateurs, de cibistes, de centres radar et de radios FM... Elles n'ont encore pas débouché sur l'observation d'un ovni mais ont cependant le mérite c'est ce que l'on pourrait appeler une « retombée » - de sensibiliser ceux qui ne le sont pas déjà à l'observation du ciel... De plus en plus, en tout cas, l'expli- cation socio-psychologique prend le pas sur le mythe extraterrestre. D'excellents livres sont parus sur ce thème, le premier d'entre eux étant celui de Michel Mon- nerie, au titre provocateur: Et si les ovnis n'existaient pas ? Ce fut, en son temps, un pavé dans la mare des ufologistes, d'au- tant que Michel Monnerie est un ufolo- giste repenti. Celui de Bertrand Mé- heust, Soucoupes volantes et folklore, est également à signaler. L'auteur propose fort judicieusement des comparaisons entre les phénomènes décrits par les témoins d'apparitions d'ovnis. le fol- klore et la littérature de science-fiction dans les années 30. - Les ufologues purs et durs rejettent évidemment ces hérétiques et cherchent à relancer pour ne pas dire réveil- ler -un intérêt moribond. Il est indé- niable, en effet, que les ovnis ne font plus recette, même si quelques revues 22