46 16 L'AUTRE MONDE N°5 OVNI E 30 juin 1908, vers sept heures du matin, le ciel au-dessus de la taïga de la Toungouska, en Sibérie, fut déchiré par ce qui ressemblait formidable coup de canon. un Des centaines de fermiers, de chasseurs et de pêcheurs virent un objet se déplaçant dans le ciel à grande vitesse et émettant une lumière plus éclatante encore que celle du soleil. Un instant après, les habitants du village de Vanovara aperçurent à l'horizon une boule de feu très brillante qui bouillon- nait comme un volcan et se transforma en un nuage en forme de champignon. Un bruit assourdissant fut entendu jus- qu'à Kansk, à 800 km, à tel point qu'un mécanicien du Transsibérien y arrêta son train croyant qu'un de ses wagons de marchandise avait sauté. Une tempête s'éleva sur la taïga qui arracha les toits des isbas et brisa leurs vitres. Les ondes de choc firent deux fois le tour du monde et furent enregistrées par des barographes à Londres. Des grandes vagues envahirent les rives du fleuve Angara et des troncs d'arbres qui flottaient sur d'autres rivières furent pro- jetés en l'air. Les sismographes à Iéna, à Irkoutsk et d'autres villes encore enregistrèrent l'ébranlement terrestre. Pendant trois nuits d'affilée, à Paris et à Londres, les gens purent lire leur journal sans l'aide d'aucune lumière artificielle. Aux environs de Moscou il fut possible de prendre des photos la nuit. En Sibérie même, par temps de pluie, les nuages étaient vert-jaune, selon les notes de l'académicien A. Polkanov qui se trou- vait dans la région à l'époque en question. Le << vert-jaune » vira par la suite au rose-rouge. Au total, l'énorme boule de feu étendit ses ravages sur quelque deux cents kilo- mètres carrés et détruisit une bonne dizaine de millions d'arbres. Pendant des années, les témoins oculaires et les simples rapporteurs parlèrent du << iniracle de la Toungouska » de sorte qu'avec le temps, la vérité et la légende ont fini par s'embrouiller mutuellement. Quant à la science, elle disposaid'emblée d'une explication parfaitement satis- faisante avec l'arrivée sur Terre d'une grosse météorite qui s'était enflammée lors de sa traversée atmosphérique. A partir de 1921, des gens commencèrent à chercher cette météorite dans la forêt sibérienne, mais sans succès. En 1938 et 1939 une prospection par photographie aérienne fut entreprise au-dessus de la zone ravagée par l'explosion et en 1959-1960, d'autres expéditions ont été menées sur le lieu de la Toungouska. Actuellement, il ne se passe pas une année sans que les explorations de la région soient conduites, des laboratoires de Moscou et d'autres en Sibérie même recevant les échantillons prélevées sur place et les analysant. coe La « Toungouska » est en effet devenue un sujet d'étude spéciale, sinon une science en soi. Au cours de la période 1908 à 1969 il n'y a pas eu moins de soixante-dix-sept auteurs qui ont publié soixante-dix-sept mémoires donnant autant << d'explications » différentes de ce qui était arrivé. Mais ce n'est pas avant 1969 que le premier travail systématique et exhaustif a été publié, contenant les diverses conclusions scientifiques. Depuis lors les faits suivants sont défini- tivement acceptés : - d'abord que l'explosion au-dessus de la taiga Toungouska a été provoquée par un corps cosmique, autrement dit issu de l'espace extra-terrestre ; ensuite que l'explosion a eu lieu à 10 km de hauteur; - enfin que le cataclysme a pour origine un événement de nature nucléaire ou thermo-nucléaire dont le dégagement d'énergie était équivalent à celui d'une bombe à hydrogène de 10 mégatonnes; - une conclusion additionnelle est que, durant le voyage de « l'objet » dans l'atmosphère terrestre, sa trajectoire et sa vitesse ont subi des variations. Par contre, la nature exacte de la réaction LE MIRACLE DE LA TOUNGOUSKA PAR ION HOBANA ET JULIEN WEBERBERCH EDITION ROBERT LAFFONT EN 1908, UNE GIGANTESQUE ET MYSTERIEUSE BOULE DE FEU S'ECRASA SUR LA SIBERIE, ET LES EFFETS DE L'EXPLOSION FURENT RESSENTIS DANS LE MONDE ENTIER. DEPUIS CETTE DATE, DES DIZAINES D'EXPLICATIONS ONT ETE DONNEES SUR L'ORIGINE SUPPOSEE DU PHENOMENE. ON A PARLE DE METEORITES, DE COMETES. AUCUNE, POURTANT, N'A PARU PLEINEMENT SATISFAISANTE. MAIS AUJOURD'HUI, EN U.R.S.S., UNE AUTRE THEORIE, DE PLUS EN PLUS, RETIENT L'ATTENTION DES SAVANTS. SES PARTISANS, ON LE VERRA, NE MANQUENT PAS D'ARGUMENTS. ET SI DES CREATURES INTELLIGENTES, VENUES D'UN AUTRE UNIVERS, AVAIENT TELEGUIDE LE « MIRACLE DE LA TOUNGOÚSKA >> ? nucléaire productrice d'énergie reste encore à déterminer, de même que la nature intrinsèque de << l'objet >>. Comme l'événement de la Toungouska est susceptible d'apporter, dans les années à venir, la preuve incontestable que notre planète a été atteinte en un endroit précis et à un moment déterminé par des créatures extra-terrestres (et la Toun- gouska, nous le verrons, a fortement stimulé les discussions relatives aux Intel- ligences extra-terrestres), il n'est pas inu- tile de détailler un peu ici les étapes parcourues par les recherches sibériennes. E N 1921, Leonid Koulik, de l'Insti- tut météorologique de Russie, publie un court article sur la météo- rite de la Toungouska. Bien qu'auto- didacte et incapable de se targuer d'une formation scientifique systématique, il fut quand même bien inspiré de comprendre que l'affaire de la Toun- gouska était scientifiquement très impor- tante. Deux ans après sa parution, son article incita le gouvernement à débloquer des fonds pour entreprendre une enquête sur place: ce fut d'ailleurs la première expé- dition scientifique à être organisée après la Révolution russe survenue cinq ans plus tôt. Koulik l'organisa sans préjuger des diffi- cultés terribles que cette tâche lui réservait rien que la recherche de l'en- droit de chute exact s'accompagna d'ennuis considérables. Les forêts sibériennes n'excitent pas notre imagination comme le font les forêts d'Afrique ou d'Amérique du Sud car elles sont peu usitées dans la littérature populaire aussi bien que dans les études de vulgarisation. Pourtant elles sont tout autant impénétrables, désolées, hostiles et inaccessibles que les forêts vierges tropi- cales. Jusqu'à la révolution de 1917, il y eut moins d'Européens à entreprendre leur pénétration qu'il y en avait eu à affronter les jungles de l'hémisphère sud. Aussi l'idée d'une expédition envoyée à la recherche d'une météorite ne vint même pas, dans les premières années du siècle, ni aux savants, ni aux aventuriers ni même au régime tsariste. La population de la région était trop clairsemée et primitive. Leurs comptes rendus parvenant à Moscou au sujet des << terrifiants actes de la nature » étaient fort loin de devoir parler « de l'endroit où le dieu Ogdi était descendu du ciel sur la Terre pour détruire par le feu tous ceux qui s'aventureraient là ». Cela ne pouvait guère faciliter les investigations sur place et rendait très difficile toute entreprise exploratrice. Koulik et ses hommes durent traverser des régions presque désertes en transportant l'équipement nécessaire pour progresser en territoire glacé. Les distances étaient inconnues et il n'y avait ni route ni piste tracées sur aucune carte. Au cours de ce terrible hiver de 1927, les compagnons de Koulik, malades et épuisés, abandonnèrent à Vanovara. Il partit alors seul dans la forêt sibérienne en compagnie d'un guide. Après avoir peiné encore plus sur les derniers kilo- mètres, Koulik atteint enfin la cime qu'il s'était fixée comme destination. Au haut des monts Chakorma, il contempla les vestiges des immenses étendues de forêt détruites par une force indescriptible. Toute la surface paraissait avoir été fauchée par une faux gigantesque : les pins géants, les mélèzes et autres essences sibériennes étaient arrachées jusqu'aux racines. Tous ces arbres gisaient, couchés dans une même direction nord-ouest comme s'ils attendaient encore une expli- cation à l'événement incompréhensible qui les avait frappés à mort. Le guide, rempli d'une terreur supersti- tieuse, refusa d'aller plus avant, et Koulik, mis dans l'incapicité d'atteindre le centre du champ de dévastation, ne put que rebrousser chemin en espérant revenir après l'hiver, avec des compagnons plus nombreux et surtout plus courageux. Au printemps de 1928, Koulik après avoir dû se frayer un chemin à la hache parmi les arbres écroulés, atteignit finalement un endroit ouvert entouré d'un anneau d'arbres dont les racines pointaient toutes 47 48 LE MIRACLE DE LA TOUNGOUSKA vers un centre commun. Il en déduisit qu'il était parvenu à l'épicentre de l'explosion et, de ce fait, qu'il avait réalisé le rêve de sa vie. Aussitôt, aidé de ses quelques compa- gnons, il commença à dresser un bilan du cataclysme cauchemardesque. Ses pre- miers mémoires excitèrent l'intérêt du monde entier pour l'événement de la Toungouska. Koulik était alors certain que la catastrophe avait été causée par une énorme météorite. C'était là une théorie tout à fait « normale >> et accepta- ble pour cette époque et aucune autre hypothèse n'aurait pu être avancée. Néanmoins il ne ramena aucun fragment de météorite et, bien plus, il ne put découvrir le cratère qu'elle avait forcé- ment creusé! Il trouva par contre quan- tité d'arbres dénudés de toute branche et de tout feuillage. Ils étaient morts, leurs racines hors du sol. Il n'y avait plus qu'un champ de poteaux juste là où l'explosion avait eu lieu. On suppose qu'à une altitude d'environ 5.000 mètres, le combustible radio-actif d'un vaisseau interplanétaire inconnu qui essayuit d'atterrir a explosé, entraînant la destruction de l'engin. Le chasseur S. Sémionov, témoin de la << chute » de la Toungouska. Photo prise en 1928. L ES explosions nucléaires d'Hiro- shima et de Nagasaki, en 1945, avec leur boule de feu d'une intensité insoutenable et leur nuage radioactif en forme de champignon, rappelèrent ce qui avait été vu en 1908 sur la Toungouska. Le magazine soviétique Vogroug Svieta (« Autour du Monde ») publia un article de l'auteur de science-fiction A. Kaeantsev dans son numéro de jan- vier 1946. Il y suggérait que « l'objet » de la Toungouska pouvait bien être en fin de compte un vaisseau de l'espace venu d'une autre planète, propulsé par l'énergie nucléaire. Il aurait explosé en essayant d'atterrir au milieu de la forêt sibérienne. Ainsi qu'il en est toujours en matière d'explosion nucléaire, il ne pouvait stric- tement rien rester du vaisseau, surtout s'il avait explosé au-dessus du sol, sans avoir pris contact. Dans ces conditions: pas de cratère, et on expliquait du même coup pourquoi, à l'épicentre, les arbres situés juste en dessous étaient demeurés droits alors qu'ailleurs ils avaient été abattus: les troncs recevant l'onde de choc à angle droit avaient perdu leur cime, leurs bran- ches et leurs feuilles, tandis que les arbres se présentant sous un certain angle se trouvaient arrachés et plaqués au sol selon la direction de l'onde incidente, sur des kilomètres à la ronde. La théorie de Kazantsev fut rejetée par une partie des cercles scientifiques qui la jugèrent parfaitement excentrique. << L'objet qui a atteint le sol sur la Toungouska était une météorite et non un vaisseau spatial, c'est absolument hors de doute », écrivait l'académicien V. Fesenkov. E. Krinov, secrétaire scien- tifique du Comité d'Etudes sur les météorites expédia le sujet en quelques mots : « L'explosion ne s'est pas du tout produite à une altitude de plusieurs cen- taines de mètres, comme l'a affirmé Kazantsev, mais au moment même où l'objet a touché le sol. Le cratère qui en est résulté a été aussitôt rempli par l'eau. Il n'y a absolument rien de mystérieux au sujet de la météorite de la Toungouska et de son origine ». C'en est assez à ce sujet ; mais n'est il pas utile de constater que les conclusions non scientifiques du romancier de science- fiction collent beaucoup mieux avec les faits actuellement connus que ne le fai- saient les suppositions avancées par les savants? Nous allons en juger. Depuis 1958, plusieurs expéditions sont retournées sur la Toungouska: princi- palement de jeunes amateurs originaires de Sibérie, de l'Oural, de Moscou et de Leningrad, qui les entreprirent dans le cadre de leurs vacances en les finançant eux-mêmes. Deux groupes se formèrent ainsi, qui existent encore aujourd'hui. A la tête de la première équipe, A.V. Zolotov, un géophysicien, qui estime que c'était une explosion nucléaire d'origine cosmique. Après plusieurs années, d'autres scienti- fiques russes ont rejoint ce groupe, tels E.K. Fiodorov, M.A. Leontovitch B.P. Constantinov. Zolotov est mainte- nant considéré comme le spécialiste de la question Toungouska. et Le second groupe est dirigé par G. Plekha- nov et N. Kochelov qui soutiennent que c'est une explosion nucléaire qui a eu lieu sur la taïga Toungouska en 1908, mais dont la cause était naturelle. La « chose >> qui dévasta la forêt était faite selon eux d'une poussière radioactive. Ce second groupe s'est développé et il est devenu l'officiel « Institut pour la recherche en laboratoire sur les Objets Cosmiques tombés en Sibérie et la Russie Orien- tale ». En 1958, un groupe de spécialistes appar- tenant au Comité d'Etudes sur les météo- rites, dirigé par Cyril Florenski, vint examiner la Toungouska sur les traces de Koulik, le pionnier de la première heure. Après plusieurs années de recherche cette équipe arriva à une conclusion définitive : « La météorite a explosé en altitude ». Ces spécialistes ont déduit cela à partir de calculs fondés sur les directions des ondes de choc, mais également grâce à un enregistrement au barographe fait en 1908, qu'ils ont exhumé des archives de l'Institut de Physique de Postdam. Ils ont calculé, grâce à lui, que le déplacement de l'air initial, se situait au maximum à cinq kilomètres la « chose » a explosé sur la Toungouska approximativement à cette altitude. Conclusion confirmée un an après par des essais en laboratoire. I.T. Zotkine et M.A. Tsikouline ont fait une simulation du désastre en plantant des petits mor- ceaux de bois sur un plateau de deux mètres sur trois qui reconstituaient la zone dévastée à l'échelle 1/10 000e. Pour étudier les effets des ondes de choc de l'explosion une « bombe >> miniature fut suspendue à un câble incliné au-dessus de la mini-forêt. Cette << bombe » pouvait coulisser le long d'un câble et était déclenchée à des vitesses et des altitudes variables. Cette méthode a permis d'établir que l'explosion se faisant quand la bombe arrive sous un angle de 27 degrés, une « zone de désastre » se formait, tout à fait similaire à celle observée sur place. Les calculs plus précis effectués mainte- nant situent les 5 km à la limite inférieure et on peut tabler sur une altitude plus exacte située à 10 km au maximum. Le professeur Fessenkov, autorité émi- nente, considéré comme étant l'expert << officiel » de la Toungouska, le même qui avait rejeté avec indignation la théorie de, Kazantsev des années avant, accepte la conclusion nouvelle ; maintenant Fessenkov a dû admettre et estime comme hors de doute que la catastrophe de la Toungouska n'a pas été provoquée par une météorite. Et ce pour deux raisons : - Il n'y a aucune trace de météorite sous-jacente, comme le démontrent les mesures du terrain au magnétomètre qui reste parfaitement constant quand on le promène par avion sur toute la superficie. La couche glacée sur 25 m de profon- deur, qui donne à la taïga une de ses caractéristiques essentielles n'a été rompue ni à l'épicentre ni dans le voisi- nage immédiat. Cette glace, vestige de la dernière époque glaciaire d'il il y a douze mille ans, n'aurait pu se reconstituer sans laisser aucune trace après avoir été brisée ou temporairement fondue par un objet énorme de la taille nécessaire pour pro- duire de tels dommages extérieurs. On s'est aperçu aussi que l'impact avait été accompagné d'une variation impor- tante du champ magnétique terrestre décelé à Irkoutsk mais également à Greenwich, or des variations d'une telle intensité ne peuvent être provoquées par des météorites. En outre le phénomène lumineux qui persiste trois nuits durant, début juillet 1908, ne pouvait être induit par des nuages de particules d'origine terrestre. Aucune météorite, quelle que soit sa grosseur, ne pourrait produire un nuage de poussière si haut dans l'atmo- sphère en supposant qu'elle se précipite sur notre planète et explose au cours de sa traversée atmosphérique. De plus, un tel nuage ne pourrait se déplacer en quelques heures sur des distances séparant Vanovara de Londres et de Paris. Ce n'est donc pas une météorite affirme le professeur Fessenkov. Mais qu'était-ce alors? Un autre corps cosmique est peut-être responsable, selon lui. « Il est hors de doute, écrit-il qu'en 1908 une comète a explosé au-dessus de la taïga et de la Toungouska ». Notons l'emploi, une nou- velle fois de la formule Hors de doute ! De tous les corps cosmiques connus, seules les comètes, en plus des météorites et des astéroïdes, peuvent venir au contact du sol terrestre. C'est pour cela que l'idée a glissé de la météorite vers la comète quand la première théorie celle de la météorite - a été rejetée dans les années 60 par les scientifiques même les plus conservateurs. Mais ce n'était pas, disons-le, une idée tellement nouvelle puisque l'astronome américain Wipple l'avait déjà émise dès 1930, soutenu aussitôt après par l'astronome russe I.J. Astapovitch. L'hypothèse cométaire a trouvé sa moti- vation principale dans l'observation des trois nuits du 30 juin, 1er et 2 juillet en Sibérie comme en Europe : elle mène tout naturellement à l'adoption de l'hypothèse cométaire, car cette luminosité aurait pu être provoquée par la queue de la comète pénétrant l'atmosphère terrestre. Le professeur Zigel fut l'un de ceux qui s'éleva contre cette théorie, certes accep- table quant au principe, mais qui semble ne pas pouvoir résister aux critiques. En effet, que pourrait-il survenir si une comète venait heurter réellement notre planète ? Le cœur des comètes est fait d'un noyau de glace solide qui doit mesurer quelques centaines de mètres, voire plusieurs kilo- mètres dans certains cas. Une telle agglo- mération gigantesque de glace cosmique doit contenir de nombreux fragments solides d'origine météoritique. A sa sur- face le noyau cométaire est recouvert d'une couche relativement mince de pous- sière cosmique; au centre, la glace (H2O) incorpore des gaz tels que l'ammoniac et le méthane. De sorte qu'à son approche du soleil, en devenant plus chauds, les gaz vaporisés diffusent et forment la queue de la comète s'étendant sur des millions de kilomètres. Ces gaz s'échappent sous pres- sion et chassent les poussières cosmiques superficielles formant ainsi la queue. La comète hypothétique de la Toun- gouska ne pouvait être de petite taille, ne serait-ce que par la valeur de l'énergie dégagée: 1023 ergs au moins, après esti- mation des différents effets thermiques et mécaniques. Si donc, en 1908, une comète de cette grosseur avait percuté le sol, un cratère d'une centaine de mètres de profondeur et de plusieurs kilomètres de diamètre aurait été creusé. On sait qu'il n'en est rien et l'épicentre ne fait apparaître au- cune trace; le marécage qui s'y trouve ne se distingue en rien des autres et il ne trahit aucun dommage visible entre les arbres dénudés et abattus. En outre l'absence totale de fragment quelconque d'un objet qui aurait éclaté rend la théorie cométaire tout aussi dou- teuse que celle de la météorite avancée avant. Aucun morceau de comète ni de météorite n'a été trouvé. Quant à la luminosité du ciel qui a permis aux gens de Londres et de Paris de lire leur journal en pleine nuit, ce n'est certainement pas une queue cométaire qui en a été responsable. Notre planète a fait plusieurs fois l'expérience d'une tra- versée de queue de comète en 1861, en 1882 et 1910 par exemple, et un tel événement n'a jamais été accompagné de phénomène lumineux atmosphérique et de perturbation magnétique comme ceux qui ont accompagné le cas de 1908. Les queues des grandes comètes s'appro- chant de la Terre paraissent très brillantes et immenses alors qu'elles sont encore à des dizaines de millions de kilomètres. Si une comète était réellement venue heur- ter la Terre en 1908, cet objet énorme aurait été aperçu bien avant dans le ciel astronomique, et sa queue, sans cesse grandissante, n'aurait pu échapper à l'ob- servation. ENCHONS-NOUS maintenant sur une autre hypothèse qui connaît actuellement une faveur de plus en plus grande celle d'une explosion d'ori- gine nucléaire ou thermonucléaire. L'atomiste américain W.F. Libby, prix Nobel 1960, est un ardent défenseur de cette idée qui repose sur la question précise déjà posée ci-dessus : l'explosion de caractère nucléaire sur la Toungouska fut-elle d'origine naturelle ou artifi- cielle ? Avant d'aller plus loin dans le raisonne- ment, examinons les arguments qui mènent à cette théorie. Quels sont les faits? A environ 17 ou 18 km de l'épicentre, Zolotov a trouvé des arbres dépouillés et portant les traces du flux calorifique de l'explosion. Un Une analyse scrupuleuse des cercles_annuaires des arbres a permis au géophysicien Zolotov de conclure qu'après 1908 la radioactivité a beau- coup augmenté sur le lieu de la catastrophe et que seule une explosion nucléaire a pu en être la cause. L'écorce brûlée d'un arbre se trouvant à quelques kilomètres de l'épicentre de l'explo- sion de la Toungouska. 49 50 50 PHOTOS A.P.N. AGENCE DE PRESSE NOVOSTI LE MIRACLE DE LA TOUNGOUSKA arbre vivant voit son écorce noircir quand elle est exposée à recevoir 60 à 100 calo- ries par centimètre carré d'un rayonne- ment électromagnétique (chaleur et lumière). C'est d'ailleurs à partir de ce fait qu'on a pu calculer que l'énergie libérée par l'explosion avait été de l'ordre de 1,5 1023 erg. Cette valeur de flux rayonnant représente un tiers ou la moitié de l'énergie totale. D'autres valeurs tirées de données physiques tout à fait diffé- rentes aboutissent à la fourchette 1,0 1023 et 1,4 1023 erg, en excellent accord avec la valeur ci-dessus. Or, cette proportion de l'énergie rayon- nante par rapport à l'énergie totale est typique des explosions nucléaires et ther- monucléaires et nullement des explosions de nature chimique où presque toute l'énergie est mécanique. Connaissant la valeur du flux de rayonne- ment émis par le centre explosif, on peut en déduire la température: le corps cen- tral de la Toungouska a été porté à plusieurs millions de degrés et la boule de Petites boules de fer et de nickel recueillies sur le lieu de la catastrophe. Elles ont une proportion de 7 à 10% de nickel, alors que dans le fer normalement trouvé sur Terre, cette proportion ne dépasse pas 3%. МЕННАЯ 6 TYHTYCKA Photo-schéma de la région où s'est produite la catastrophe: 1. Trajectoire de Krinov 2. Front de l'onde d'explosion - 3. Front de l'onde balistique - 4. Limite des arbres abattus 5. Zone des arbres debout mais morts - 6. Limite de la zone comprenant quelques arbres abattus - 7. Sentier de L. KOULIK 8. Trajectoire de A. Zolotov. - feu qui s'est développée en quelques secondes a rayonné assez d'énergie élec- tromagnétique pour calciner les bran- chages des arbes jusqu'à 15-18 km de là. Un des plus proches collaborateurs de Koulik, E.L. Krinov avait remarqué que, sur certains arbres, des petites branches étaient noircies en partie seulement. En fait elles ont été protégées par l'ombre des branches plus grosses. Des obser- vations plus récentes ont montré que la combustion a été provoquée par un apport soudain de calories et non pas par un simple feu de forêt qui aurait de toute évidence consumé entièrement les petits branchages. Autre fait curieux, en liaison avec ce qui précède : la profondeur de la combustion n'est pas uniforme sur tel ou tel arbre pris au hasard. On en déduit que le feu n'est pas venu par la base des arbres. Ainsi, les parties brûlées n'ont pu l'être par du gaz incandescent venu du sol car il aurait fallu pour cela une explosion plusieurs fois plus puissante qu'elle n'a été, auquel cas les arbres situés encore plus loin de l'épicentre auraient été déracinés. Tous ces arguments concordent pour attribuer aux effets thermiques de l'ex- plosion une origine nucléaire. Une autre preuve, s'il en fallait encore une, se trouve également dans les diverses observations faites sur les enregistrements des micro- barographes dans le monde entier en date de ce 30 juin 1908: des ébranlements atmosphériques infrasoniques sont passés, dont les fréquences étaient comprises entre 0,001 et 0,1 Hz. Ces fréquences sont caractéristiques des explosions nuclé- aires de grande puissance effectuées dans l'atmosphère. En ce qui concerne la perturbation du champ magnétique et les trois nuits de luminosité du ciel sur les grandes villes de l'ouest européen plusieurs physiciens de Tomsk ayant à leur tête Plekhanov, ont publié en 1960 des conclusions sur la comparaison entre l'explosion de Bikini en 1958 avec celle de Sibérie un demi- siècle plus tôt. Il y eut à Bikini une variation du champ magnétique terrestre semblable à celle observée en 1908. La coloration des nuages en jaune, puis en rose, résulte de leur contact avec les poussières radioactives nitreuses projetées dans l'atmosphère par les champignons. Donc, à la fin de 1908, il semble bien qu'il y eut une explosion de caractère nucléaire au-dessus de la taïga sibérienne. La question qui subsiste est simplement de savoir si cette explosion était vérita- blement de nature thermonucléaire ou bien si elle était due à un ou des phénomènes naturels. Autrement dit encore, cette explosion était-elle super- ficielle ou naturelle ? Dans cet ordre d'idée il faut produire les surprenants résultats de l'expédition britannique dirigée par G.P. Plekhanov et Koschelov publiés en 1969. Une exploration systématique de la zone sinis- trée fut entreprise après que l'on eût découvert que les mélèzes et les bouleux âgés de 40 à 50 ans - donc qui avaient germé après l'explosion - au lieu de faire 7 à 8 m de hauteur en avaient 17 à 22 ! C'est-à-dire qu'ils atteignaient une taille que des arbres << normaux >> de ces espèces n'atteignent qu'au terme de deux ou trois siècles! De tels développements exceptionnels sont typiques de la part des végétaux exposés aux rayonnements émis par les corps radioactifs. Dans les laboratoires de l'Institut géographique Valga, un examen approfondi a été fait de plus de cent sections d'arbres prélevés dans la zone dévastée. On a fait de sept à quinze prélèvements sur chacun d'eux de sorte que les mesures ont porté sur plus de mille échantillons. La majorité d'entre eux, morts ou encore vivaces, trahissent un excès de radioactivité dès après l'explosion: les 10 à 25 anneaux qui suivent l'année 1908 sont nettement plus radioactifs, comme les mesures très fines que nécessitent ces techniques viennent de le montrer. Cette augmentation de la radioactivité dans les anneaux annuels de bois qui a poussé juste après 1908 nous mène à une conclusion importante: elle implique la présence d'isotopes radioactifs artificiels. Un détecteur de faible radioactivité a décelé la présence de Césium 137, un isotope radioactif de période (temps de demi-désintégration), égale à trente-trois ans dans du bois de la Toungouska. Ainsi, en gagnant de plus en plus d'adeptes, l'hypothèse nucléaire a suscité diverses théories dont celle du physicien Urey sur la chute possible de corps radioactifs - météorite ou comète se comportant comme une bombe atomique et radioactivant les arbres sitôt après sa plongée atmosphé- rique, par son explosion en altitude. Néanmoins aucune de ces théories n'a résisté à l'épreuve du temps, pas même celle de la comète au noyau explosif capable d'avoir une retombée radioactive ultérieure analogue à celle d'une bombe thermonucléaire. Cette comète, pour libérer la quantité de gaz nécessaire, aurait dû avoir un noyau de 50 à 70 m de diamètre, ce qui, encore une fois, est impossible du fait de la vitesse très faible que « l'objet » avait en décrivant son arc balistique. C ETTE idée d'une cause artificielle trouve un argument de poids dans la reconstitution de la trajectoire suivie par l'objet bien que les conclusions de cette investigation ne soient pas encore définitives. Nous en donnons l'essentiel dans ce qui suit. D'après les données publiées en 1964, l'objet semble avoir suivi une route allant du sud vers le nord (c'est la variante dite sud). Zolotov et ses collègues sont arrivés à une conclusion différente après avoir étudié les troncs d'arbres abattus dans la zone ravagée. La trajectoire suivie par l'objet est donnée par la direction qu'indi- que l'axe des troncs d'arbres renversés par l'onde de choc balistique. Or cette trajec- toire montre un renversement de direc- tion frappant, allant d'abord approxima- tivement d'ouest en est puis elle s'inverse d'est en ouest (c'est la variante dite est. Voir la carte ci-dessous). Les arguments les plus convaincants en faveur de la variante sud on été avancées par le professeur Astapovitch. Il les a fondés d'une part sur des calculs compli- qués en relation avec les secousses sismi- ques et les changements du champ élec- trique enregistrés lors de l'arrivée de l'objet et, d'autre part, sur les relations oculaires des témoins qui vivaient sur les lieux - séparés par de nombreux kilo- mètres les uns des autres et qui virent directement la trajectoire ou qui enten- dirent l'une ou l'autre des deux ondes sonores. Les calculs comme les conclusions des deux équipes de chercheurs qui ont tra- vaillé indépendamment l'une de l'autre se sont avérés être précis quand on les contrôle à partir de l'épicentre. Les me- sures déjà mentionnées, faites au labora- toire de Zotkine et Tsikouline, où l'explo- sion a été simulée en réduction, ont montré que les deux variantes sud et est n'étaient pas contradictoires et s'excluaient nullement. On est donc en droit d'affirmer que l'objet de la Toun- gouska a modifié sa course en vol, ce qui impliquerait que « quelqu'un » la ma- nœuvrait. ne Après avoir pénétré dans l'atsmosphère, l'objet avait une trajectoire sud-nord jus- qu'aux environs de Kejma où il obliqua brusquement vers l'est. Parvenu au voisi nage de Préobrajenska il revint vers le nord-ouest. Un astronome de l'obser- vatoire Tatranska (alors polonais, aujour- d'hui situé en Tchécoslovaquie) avait noté, le 30 juin 1908, une « boule de feu » qui changea brusquement la direc- tion de sa course au-dessus de la Pologne, défiant ainsi toutes les lois de la méca- nique. Ce même objet, très certainement - car l'heure donnée par l'astronome concorde est ensuite devenu la << météorite » ou « comète » Toungouska qui effectua l'étrange ballet que l'on sait avant d'exploser. Il y a plusieurs indices reliés les uns aux autres, non seulement la direction et la vitesse, mais également la hauteur, qui nous font penser que l'objet était guidé. Or guider quelque chose d'origine natu- relle nous paraît impossible. Compte tenu de l'unanimité des témoignagnes relatifs aux changements de direction, on peut difficilement douter maintenant de la nature de ce qui explosa au-dessus de la taïga en 1908: il possède toutes les caractéristiques d'un appareil extra- terrestre piloté ou téléguidé par des créa- tures intelligentes. Mais en déduire, comme le fit l'écrivain Kazantsev en 1946, qu'il explosa à la suite d'un accident nous semble quand même assez aventuré, bien que, dans les limites de l'imagination humaine, toutes les hypothèses soient évidemment permises. L'explosion de la Toungouska pourrait très bien avoir été une expé- rience entreprise par des Intelligences extra-terrestres pour étudier les effets sur notre planète ou bien encore pour attirer notre attention sur leur existence. Est-ce absurde ? Début septembre 1971, s'est tenu à l'extrême sud de l'Arménie soviétique, dans la lointaine ville de Biourakan, un congrès scientifique inter- national qui s'avérera peut-être avoir une importance historique, plus tard. Des chercheurs de l'U.R.S.S., des U.S.A., de Grande-Bretagne et de divers pays de l'est européen, dont la Tchécoslovaquie et la Hongrie, se réunirent pour discuter de l'existence possible de mondes habités en dehors de la Terre. S'y ajouta l'analyse des différentes méthodes pour prendre contact avec des civilisations extra- terrestres. En général, les astronomes soviétiques sont plus portés sur les spéculations de cet ordre que ne le sont leurs collègues occidentaux. C'est le cas, en particulier, du professeur Victor Ambartsoumian qui présidait ce congrès, directeur de l'obser- vatoire de Biourakan, observatoire équipé d'un grand radio-télescope. Dans le cadre des discussions relatives au moyen de rendre notre existence perceptible aux civilisations dans l'espace, plusieurs scien- tifiques préconisèrent l'explosion de bombes thermonucléaires dans les zones << relativement » proches de la Galaxie, où l'on peut penser raisonnablement qu'une vie douée d'intelligence s'est développée. Le lien possible entre le « miracle de la Toungouska » et les phénomènes OVNI est à la portée de quiconque. Il est parfaitement plausible que des créatures intelligentes, responsables de la présence des << soucoupes volantes » dans notre espace aérien, aient pu être à l'origine de l'explosion de la Toungouska. Les OVNI sont-ils encore en train de chercher ce qui a provoqué ce naufrage ou bien ont-ils tiré immédiatement les conclusions qui s'imposaient de cette explosion, ce qui leur a permis de naviguer depuis lors sans danger dans notre atmosphère ? Qui pourrait nous le dire? L'homo sapiens ? LES O.V.N.I. EN URSS Dix millions d'arbres furent détruits par un éclair fulgurant en Sibérie (voir l'article ci-contre). Etait-ce celui d'une explosion nucléaire ? En 1908 ? Une fresque d'un monastère médié- val, en Yougoslavie, déconcerte les érudits. Pourquoi donc les moines ont-ils dessiné un vaisseau spatial planant au-dessus du Golgotha ? En plusieurs occasions, des cosmo- nautes soviétiques ont affirmé avoir vu des « cylindres volants » dans l'espace qu'ont-ils vu vraiment ? Julien Weverbergh, un écrivain belge, et lon Hobana, un journaliste scientifique roumain, ont réuni un dossier établi dans le monde entier sur des événements qu'ils consi- dèrent comme plus ou moins inex- plicables compte tenu de notre savoir actuel. Utilisant des sources historiques, des rapports officiels et scientifiques et d'innombrables témoignages, ils présentent dans leur livre « Les O.V.N.I. en U.R.S.S. et dans les pays de l'Est >> la première somme sur l'existence d'O.V.N.I. au-delà de ce que l'on appelait, autrefois, le rideau de fer. L'approche des auteurs reste froide et critique. Leur conclusion est que les rapports d'observation sur les O.V.N.I. à l'Est présentent un caractère de similitude et de répé- tition exactement parallèle aux faits observés à l'Ouest, et que les scien- tifiques << conventionnels >> ont beaucoup trop vite rejetés. Les O.V.N.I. sont-ils d'origine extra-terrestre ? Ont-ils quelque chose à voir avec des tentatives de communication de la part de civi- lisations situées fort loin de nous, voire appartenant à d'autres gala- xies ? Sont-ils reliés à d'autres phénomènes psychiques, tels ceux de la transmission de pensée ? Beaucoup de savants soviétiques le pensent. Tout comme nombre de leurs collègues occidentaux. Julien Weverbergh et lon Hobana nous apportent, en la matière, grande abondance d'anecdoctes et de témoignages inédits. A noter la ri- chesse des illustrations, avec, en particulier, d'étonnantes photos d'O. V.N.I. prises en U.R.S.S. et dans les pays de l'Est. Les O.V.N.I. en U.R.S.S. et dans les pays de l'Est, par lon Hobana et Julien Weverbergh. Collection << Les Enigmes de l'Univers ». Ed. Laffont. 51