La ville qui attend les Martiens AUB ARÈS (GIRONDE), HIER. Christian Esplandiu, président de l'Office du tourisme de la ville, pose à côté de la soucoupe qui trônera cet après-midi sur l'ovniport. (LP/PATRICK BERNARD.) Depuis 1976, Arès, petite ville du bassin d'Arcachon, est officiellement dotée d'un aéroport pour ovnis qui va accueillir aujourd'hui sa première soucoupe volante... imaginée par un artiste. et après-midi, une drôle de soucoupe volante atterrira sur l'ovniport d'Arès (Gironde), ville de 5 500 Terriens au coeur du bassin d'Arcachon. Jusqu'alors à l'abri des regards au centre technique municipal, l'engin en fer forgé, oeuvre d'un artiste du coin, va se poser sur l'un des rares aéroports de notre planète conçus pour accueillir les objets volants non identifiés. C'est la star annoncée de l'événement inso- lite Allô Arès ? Ici ovni ! qui se dérou- lera demain dans la commune dans le cadre des festivités du centenaire de l'aéronautique en Aquitaine. Trente- quatre ans déjà qu'Arès dispose offi- ciellement d'une piste d'atterrissage dédiée aux petits hommes verts. En forme de triangle isocèle, recouverte de pavés qui font office de tarmac, elle est située en front de mer, sur l'espla- nade. En 1975, une bande de citoyens arésiens menée par un dénommé Ro- bert Cotten, électronicien à l'aéroport de Mérignac et passionné par l'es- pace, s'était émue auprès des autorités locales de l'absence d'une aire de ré- ception pour les ovnis. Une pétition fut alors adressée au conseil muni- cipal qui décida de répondre favora- blement à la demande loufoque lors d'un vote solennel des élus. Une opération déstinée à faire parler de la ville Le 15 août 1976, en pleine Fête de l'huître, le premier ovniport du globe, équipé d'un manche à air et de quel- ques balises prêtées par l'aéroport de Mérignac, était enfin inauguré. Il était décrété que les extraterrestres seraient exemptés de taxes d'atterrissage, qu'ils pourraient prendre part aux tournois de pétanque et de patins à vase, ces planchettes de bois fixées aux pieds, utiles pour marcher dans la vase et recueillir palourdes et bigorneaux des environs. La blague estivale n'était vraiment pas désintéressée. « C'était une vaste plai- Arès Bordeaux GIRONDE santerie. Mais les élus ont joué le jeu parce qu'ils se disaient que c'était le moyen d'attirer le plus de touristes possible », raconte Christian Es- plandiu, président de l'office de tou- risme d'Arès. Immédiatement, l'étrange nouvelle a trouvé un écho planétaire. « Cela a fait du buzz comme on dit aujourd'hui. Les jour- nalistes du monde entier ont ac- couru »>, se souvient-il. << Les réactions étaient parfois très sérieuses, un Américain avait écrit dans les années 1980 pour féliciter la municipalité et expliquer qu'il en vou- lait à son président de l'époque, Reagan, de ne pas avoir fait la même chose », assure Jean-Guy Perrière, maire (DVD) depuis 2001. En plus de trois décennies, ufologues (passionnés d'ovnis), curieux mais aussi enfants rêveurs n'ont jamais cessé de se déplacer dans la station balnéaire. Parmi les 15 000 à 20 000 touristes de passage chaque année, ily en a << beaucoup plus qu'on ne le pense»>, à en croire l'édile, qui viennent pour l'ovniport, doté d'une « stèle commémorative » rappelant que le site est réservé à l'accueil «< des voya- geurs de l'univers ». Un équipement municipal qui n'a, pour l'heure, jamais servi. A Arès, le gag amuse la plupart des habitants. << Mais il y a toujours quel- ques personnes qui jugent que ce n'est pas très sérieux, qu'il y a des choses bien plus importantes dans la vie »>, concède le maire. « C'est un truc d'illu- minés », raille un restaurateur qui ne croit << pas du tout » aux Martiens. «Moi, je n'y crois pas encore, j'attends de les voir »>, sourit, de son côté, Chris- tian Esplandiu, de l'office de tourisme. Quant au premier magistrat, il pense qu'il existe «< un monde inconnu dans cet univers dont on ne connaît pas les limites >>. << Je me demande s'il y a de la vie ailleurs », confie-t-il sérieusement. VINCENT MONGAILLARD