Les Dernières Nouvelles d'Alsace 18 Novembre 1990 Espace Le mystère des « boules de feu» éclairci Les derniers instants d'une fusée russe M. Daniel Metzlé, le chef du service de presse du CNES en marge du collo- que sur la politique spa- tiale française à la Sor- bonne. Imaginez que de- puis les temps du Spoutnik il a maintenant 7500 objets qui gravitent autour de la Terre, dont 1500 sont «ac- tifs». Pas étonnant que de temps en temps ils nous surprennent par un feu d'artifice céleste boules de lumière multicolores, étincelles, trainées lumi- neuses, etc., en se désinté- grant en rentrant dans l'at- mosphère comme en cette soirée du 5 novembre. DNA REGION Une centaine de témoignages écrits et environ autant de coups de téléphone - tel est le bilan de notre « Opéra- tion ovni» à la suite du phénomène lumineux observé par de nombreuses personnes dans la soirée du 5 novembre dans le ciel d'Alsace. De Mulhouse à Wissembourg nos lecteurs se sont mobilisés. Témoins de cette apparition insolite, ils ont joué aux reporters en relatant, parfois avec une étonnante précision, leurs observations souvent accompagnées de croquis et de dessins. Nous les en remercions L'ensemble de ces docu- ments constitue une mine de renseignements excep- tionnels que nous trans- mettrons au Centre natio- nal d'études spatiales (CNES). Au Service d'ex- pertises pour les phéno- mènes de rentrées atmo- sphériques (SEPRA) È Toulouse, ces « enquêtes> de nos lecteurs permet- tront de mieux cerner ce phénomène qui était dû à la chute d'un morceau de fusée soviétique (cf. DNA du 10-11-90)). De toute évidence, les Martiens n'ont pas atterri en cette soirée du 5 novem- bre et les extraterrestres ne nous ont pas encore rat- tachés à l'empire galacti- que n'en déplaise à Raël, le messager» des extra- terrestres, qui a participé mardi soir à TF1 à une émission consacrée à l'ovni du 5 novembre et dont le mouvement a tenu une conférence vendredi soir à la faculté des lettres de Strasbourg pour faire part d'un message capital pour l'humanité». De toute évidence, le phénomène n'était pas non plus provoqué par la chute et l'éclatement dans l'at- mosphère terrestre d'une météorite.. L'hypothèse avancée quelques heures après l'événement par des astronomes allemands de Munich était donc erronée. Notons ici que ce n'étaient pas des astronomes profes- sionnels qui soutenaient cette thèse, mais le porte- parole de l'observatoire po- pulaire qui regroupe essen- tiellement des amateurs et des curieux du ciel. Y En revanche, M. Daniel Karcher, de Wittenheim, qui informe régulièrement nos lecteurs sur les pé- riodes de visibilité des sa- tellites et des stations spa- tiales, avait vu juste en af- firmant dès le 5 novembre que le phénomène était dû à la chute d'un satellite ou de l'étage d'une fusée ré- cemment lancée. En l'ab- sence d'informations pré- cises. de la part des autori- tés ou des centres spatiaux,. il y avait cependant un cer- tain flottement et beau- coup d'interrogations. De Pau à Strasbourg Le vendredi 9 novembre, le CNES publie un commu- niqué précisant que « l'ob- jet Immatriculé 20925/1990/094 C, le trol- sième étage d'un lanceur soviétique, se trouvant sur une orbite d'attente est re- descendu le 5 novembre à 19 h et a traversé la France, dans sa phase fi- nale, sur une ligne Pau- Strasbourg. Le même jour, le quotidien allemand Bild> fournit la même ex- plication en citant des sources américaines. Pour les experts US, le phéno- mène a eu lieu à 19 h 06, or il a été observé au-dessus de l'Alsace à 19 h 01... D'où vient cet écart? Se- lon M. Karcher, qui a cal- culé la trajectoire de ren- trée de l'objet, 19 h 06 cor- respond au moment de l'impact, l'instant où les Saliout 7 au-dessus de l'Alsace La station Saliout 7 inoccupée gravite actuellement à 310 km d'altitude autour de la Terre. Elle s'approchera pro- gressivement de notre planète: sa chute dans l'atmosphère est attendue pour fin janvier. Ces jours-ci, la station est visi- ble comme une étoile brillante dans le ciel alsacien. M. Kar- cher vient de nous communiquer les heures de passages sui- vantes: dimanche 18/11, 17 h 51 à 43° au-dessus de l'horizon nord; 19, 18 h 06, 43 N; 20, 18 h 21, 53 N; 21, 18 h 36 au zé- nith; 22, 16 h 15, 48° N; 23, 18 h 48, 30° ouest. Le 5 novembre dernier, nous avons pu suivre les effets de la désintégration du 3e étage d'une fu sée Proton, un objet de la taille d'un autobus. - derniers débris (s'il en res- tait) ont touché le sol. Le 3e étage aurait en effet survo- lé le golfe de Gascogne à une altitude de 110 km pour se diriger ensuite vers Royan et Nevers. A 19 h 01, l'objet se trouve à la verti- cale de St-Dié, quelques se- condes plus tard il survole Geispolsheim au sud de Strasbourg à une altitude de 83 km, une minute plus tard Nuremberg (le phéno- mène a été bien observé en Bavière du Nord). A 19 h 03, il passe au sud de Prague, à 19 h 05 au nord de Kiev pour atteindre à 19 h 06 une région située 450 km au sud de Moscou. L'objet, de la taille d'un autobus, était le 3e étage d'une fusée Proton qui de- vait mettre sur orbite, le 3 novembre dernier, le satel- lite de télécommunication Gorizont 21. «L'objet était un cylindre long de 10 à 15 mètres avec un diamè- tre de 3 à 4 mètres pesant quelques tonnes», nous a expliqué l'autre jour D'abord, « nous avons vu une forte lumière blanche», écrit M. LW. de Wahlenheim, qui distingue, quelques instants plus tard, «deux autres points lumi- f neux des deux côtés de la lumière blanche. Ces deux. lumières sont moins in- tenses en virant l'une vers le bleuté, l'autre vers l'orange... Puis suivent d'autres lumières blanches (beaucoup plus petites que les trois autres) avec des traînées». Lorsque le phé- nomène s'éloigne en direc- tion de Haguenau, donc vers le nord-est, « nous apercevons des traînées derrière les trois grosses boules, de teinte plutôt jaune que blanche... L'en- semble se déplaçait sans bruit audible à la vitesse apparente d'un avion en approche de piste ». La plupart de nos lec- teurs ont été fascinés par la beauté féerique et sur- naturelle > du spectacle, par le silence » de ce «feu d'artifice céleste»... Dans très peu de temps, nous as- sisterons peut-être à nou- veau à un tel spectacle: lorsqu'en janvier prochain la station soviétique Sa- liout 7 retombera sur Terre. A condition que la trajectoire passe à ce mo- ment-là par-dessus France... Willy BODENMULLER «Lu- (*) L'Association mières dans la nuit> (Délé- gation ovnis - Nord Alsace, M. Christian Morgenthaler, Odratzheim, tél. 8850 6426) nous a également commu- niqué le bilan de ses en- quêtes.